KARL WALDMANN ET LE CONSTRUCTIVISME  


NÉdans l'avant dernière décennie du XIX siècle dans les environs de Dresde (ex RDA) et disparu avec sa compagne russe vers 1958 dans un camp de travail en URSS, Karl Waldmann est l'une des dernières découvertes du constructivisme et assurément une découverte importante.

Lors de la chute du mur de Berlin en 1989, un journaliste, grand amateur d'art, repère sur le fameux " marchÉdes Polonais " de Berlin un marchand sortant un peu du lot de tous les autres accroupis à mê me le sol boueux. Ce vendeur-là avait en effet étalÉsa marchandise sur l'arrière du plateau de sa camionnette, un modèle des années 40, amenée sur place, débâ chée, à ciel ouvert, où s'exhibaient au-dessus de la foule, pê le-mê le, des porcelaines qui semblaient émerger d'un musée, tableaux, bibelots et boîtes de caviar. Le contenu de son étal était assiégé par les étrangers, européens, asiatiques, américains fort nombreux en ces jours-ci étant donné l'événement du Mur.
Il faut savoir qu'en 1989, dès la chute du Mur, les migrations est-ouest étaient importantes et c'était l'occasion pour les migrants de l'Est de gagner un peu d'argent par la vente d'objets (montres de l'armée, insignes, outils militaires, appareils photos russes, boîtes de caviar, antiquités, symbole du régime, etc.). C'est ainsi que ce journaliste prit connaissance de quelques "papiers collés", nichés dans une chemise de carton brun, oeuvres apparemment d'inspiration constructiviste russe. S'y déchiffrait une signature en initiales : K.W. Marquant son intérê t pour la chose, le vendeur lui proposait de revenir en fin d'après-midi pour l'emmener vers Dresde afin d'en voir d'autres.
Ainsi, dans la nuit d'un faubourg de Dresde, sont ils arrivés dans un local. On pouvait y voir à la lumière d'une ampoule qui n'éclairait que de quelques rayons poussiéreux, un spectacle de tableaux issus du romantisme allemand, polonais, expressionnisme, et aussi nombre de porcelaines pour certaines de Meissen et d'autres résolument d'inspiration moderniste ou de l'art déco en provenance de" la fabrique d'état de l'URSS " (sic). On y trouvait des signatures qui, en cyrillique, s'avéraient hélas illisibles pour l'amateur.
Ce dernier pensa à juste titre qu'il pouvait s'agir d'oeuvres "puisées dans un musée..." Donc méfiance... Dans un coin, de nombreuses oeuvres de Karl Waldmann étaient entassées auxquelles le vendeur ne portait pas une réelle attention, intéressÉen prioritÉpar la vente de ses porcelaines.
Cependant interrogÉsur Karl Waldmann, il n'en dira pas grand-chose si ce n'est qu'il était un vieil oncle, ponctuÉd'un : "Ach ya der Verrückt " (le fou) et dont il décrira très brièvement la disparition avec une femme, une artiste, une russe, " il y a longtemps, ils ont tout laissé” . L'homme n'était pas très bavard, voire muet au sujet de ce cousin éloigné. Il n'y avait pas vraiment de raison pour ce journaliste pressÉd'acheter, d'enquê ter plus loin sur la vie de ce " Waldmann ".
Rendez-vous fut pris pour le mois de février à l'Hôtel Curator de Berlin afin d'acquérir l'ensemble des oeuvres. Quelques travaux de Waldmann furent immédiatement montrés dans une vaste exposition appuyée par le Ministère de la Culture Française de l'époque, à Strasbourg : Berlin- Berlin (février 90)
Cette découverte restera relativement confidentielle jusqu'à l'année 2000, date à laquelle le nouveau propriétaire des oeuvres, s'étant entre-temps passionnÉpour leur contenu, se mit en quê te d'une Galerie afin de les exposer.

Par la suite, une recherche approfondie par la Galerie permit de retrouver des oeuvres en Allemagne dans la région de Dresde, en Italie, en Belgique, en URSS, en Ukraine, aux USA et aujourd'hui plus de 900 ont étÉinventoriées, oeuvres d'une richesse iconographique fantastique allant de 1915 aux années 1950-1960. Le pistage de la provenance des oeuvres remontait la plupart du temps à Dresde.

Dès l'année 2001, il fut évidemment question de retrouver le vendeur puisqu'il avait un lien familial direct avec l'artiste et qu'il aurait pu livrer ce que le journaliste n'avait pas cherchÉà savoir 11 ans plus tôt. Malheureusement, il a étÉimpossible de retrouver ce " local " des environs de Dresde et toutes les démarches en ce sens furent vaines jusqu'à présent. Il est très probable d'ailleurs que cet " oncle " soit décédÉentre temps vu l'apparence â gée qu'il présentait en 1989.

Il est à préciser aussi que, suite à notre inventaire de1989, l'identitÉde l'artiste apparaît clairement sur les oeuvres car certaines sont signées en toute lettre " Karl Waldmann " bien que la plupart ne soient signées que de ses initiales " K.W. ". Y avait-il une volontÉde cacher son nom ? Toute personne qui a résidÉà l'Est à cette époque sait qu'une " signature " ou mê me une " date " pouvait représenter un danger pour sa sécurité. L'emploi de pseudonyme était mê me très courant. Créer ou posséder une oeuvre qui n'avait pas l'approbation du régime impliquait une mise à l'écart des cercles officiels artistiques. Si de plus, l'oeuvre véhiculait une critique politique du régime ou mettait en avant une orientation artistique suspecte (comme l'érotisme), cela représentait un réel péril pour la personne. Afin de donner un exemple plus récent, le photographe tchèque Jan Saudek datait ses oeuvres, qui avaient un caractère pornographique, de 100 ans avant leur exécution ce qui lui permettait de dire qu'elles n'étaient pas de lui et qu'il les avaient trouvées...


Nous avons donc sous la main ou en photos plus de 900 photomontages, gouaches, assemblages divers d'une identitÉpropre, d'un sens parfait de la construction, d'une palette de tons qui distinguent Karl Waldmann des Schwitters, Heartfield, Haussmann et autres Rodchenko tout en leur étant souvent proches par certains thèmes.
À ce jour nous ne possédons aucun élément plus approfondi sur sa vie et sa personnalité. Suivant toute probabilité, Karl Waldmann n'aurait d'ailleurs pas étÉun artiste public se réclamant d'une Ecole et n'aurait jamais voulu se déclarer en tant que tel pour des raisons existentielles et politiques.
Le peu d'information à son sujet est loin d'ê tre un cas unique dans l'art allemand de cette époque qui regorge de cas semblables. Nous pouvons prendre l'exemple d'Else Lasker- Schüler (poétesse allemande du début du XXe siècle) pour laquelle il n'est guère facile de proposer une esquisse biographique car peu de dates et peu de faits sont connus. Non seulement les nazis ont détruit la plus grande partie des documents la concernant, mais les témoins, ses amis, ont presque tous disparus. Il y avait peu de chance de pouvoir produire un art engagÉen ex RDA dès l'arrivée des nazis et ensuite sous le régime soviétique qui perdurera jusqu'en 1989. De très nombreux artistes de cette région resteront à tout jamais inconnus, ayant produit leur art dans le secret de l'atelier. L'après-guerre et la guerre froide constituèrent une chape de plomb pour les intellectuels de l'Est et le culte du secret existe toujours aujourd'hui. En peinture contemporaine ce fut également le cas. Le jour mê me de la tombée du Mur des centaines d'ateliers d'artistes furent ainsi dénichés par les journalistes et autres amateurs, dont les découvertes firent les beaux jours de collectionneurs américains.
Il est un autre exemple qui vaut d'ê tre citÉdans un autre domaine de l'histoire de l'art : celui de la " disparition " du cabinet érotique de Catherine II de Russie (cfr le film de Peter Woditsch) dont plusieurs personnes ont la preuve de son existence et qui pourtant se volatilisa après 1945. Il est extrê mement difficile aujourd'hui, soit seulement 50 ans après, d'avoir des informations fiables de témoins directs ou de conservateurs actuels, au point que certains prétendent que ce cabinet, pourtant réel, n'est qu'une légende de plus.

Sans élément biographique probant concernant Karl Waldmann, nous avons cependant une très belle collection à notre disposition, impressionnante de qualité, qui demande une étude approfondie faite de comparaisons et recherches associées, et qui nous permettrait ainsi de dresser un "portrait robot" de l'esprit de l'artiste.

Pour l'Historien ou le Conservateur soucieux du tissu biographique, je répondrais que nous avons les oeuvres et que l'intelligence consiste à les comprendre, à les admettre et à les montrer, mê me si cette compréhension reste partielle ou subjective tant que d'autres éléments biographiques ne viendront pas faire ressusciter l'artiste dans son identité.

L'oeuvre

L'oeuvre de Karl Waldmann est assez diverse et ne peut ê tre raccordée à un seul mouvement. Les oeuvres de jeunesse, de composition abstraite, tout en affirmant leur individualisme, s'apparentent par analogie aux collages de Kurt Schwitters et aux premiers collages de Rodchenko ou Maïakovski : utilisation de bouts de journaux, papiers, étiquettes publicitaires, tissus. Les oeuvres rappellent les mouvements qui ont juste précédÉle suprématisme. Il faut garder en mémoire que K. Schwitters résida à Dresde aussi entre 1913 et 1917 et que cette ville était un terrain de création artistique et de passage aussi bien pour les artistes allemands que russes. C'est à Dresde aussi que se trouvait le grand musée ethnographique qui a orienté une partie de la création vers un retour aux formes primitives et où est nÉen partie le Primitivisme (Cfr Kirchner et Heckel). Cette remarque a son importance puisque plusieurs photomontages de Waldmann font intervenir des statues nègres et intègrent la rhétorique primitiviste développée par le critique Carl Einstein en 1915. Par son regard ethnographique tant sur la forme que sur le sujet, Karl Waldmann fait lui aussi la jonction entre l'Art Moderne et la sculpture primitive.

Après cette période abstraite, très rapidement les oeuvres sont d'inspiration constructiviste, dadaïste voire parfois surréaliste. Il se consacre exclusivement au photomontage dont on a attribuÉla paternitÉà Raoul Hausmann dès 1922. L'époque est mouvementée, entre le chaos de la première guerre et de la révolution, et les hésitations et violences de la république de Weimar, le nazisme commence à émerger alors que la révolution d'Octobre en URSS triomphe. Karl Waldmann est assurément un compagnon de route de la révolution de 1917 et possède une connaissance approfondie des artistes russes qui l'ont rejoint : Rodchenko, Maïakovski, Lissitsky, Malevitch, Klucis, etc. Il n'est jamais " propagandiste " dans ses oeuvres, à la différence de Heartfield, et c'est pourquoi le sens de plusieurs photomontages nous échappe. Mais il se révèle comme " grand " observateur et dénonciateur. L'artiste voit, entend, lit et ensuite illustre par le collage sa conception de la politique, de la société, de l'art (film, littérature, théâ tre, etc.…). Une connaissance de tous ces domaines - artistiques, culturels, politiques - est primordiale pour la perception intime des collages de Karl Waldmann

Les thèmes

Tout comme pour les expressionnistes allemands, le thème de la ville lui est cher. Une ville où la modernitÉs'inscrit par la présence d'usines, de cheminées, buildings, gratte-ciel, fumée. Une ville métallique qui pénètre le corps des individus, une ville déesse, envoûtante et maléfique en mê me temps. A la différence des Futuristes, Karl Waldmann met la modernitÉen avant mais pour la craindre, la dénoncer. Il ironise sur celle-ci, sur la " prospéritÉ" et la valeur de la fée Électricité. La ville et la machine sont vues comme une entitÉcriminelle et diabolique. Comme bien d'autres artistes de sa génération, il est fascinÉpar l'Amérique et c'est ainsi que de nombreuses oeuvres font référence à la ville de New-York, où " dirigeable ", " grue ", " arme ", " chaise électrique ", ancê tre de celle d'Andy Warhol, sont présents : telles les racines d'une ville jungle où le port du scaphandre est obligatoire. Les couleurs les plus fréquemment employées sont le noir et le rouge, couleur de la mort et du sang.

Cette vision de la ville et de la machine est à rapprocher d'un autre thème très présent dans l'oeuvre globale de Karl Waldmann, celui du cinéma. Le lien avec Fritz Lang est évident dans plusieurs oeuvres (Métropolis, M le Maudit) et aussi le Chaplin des Temps Modernes, des Lumières de la Ville ou du Dictateur. Les actrices de cinéma, principalement américaines, entourées et cerclées de métal, ou de fumées diverses, peuvent ê tre contemplées telles de parfaites icônes constructivistes : Marlène Dietrich, Katherine Hepburn, Ruby Keeler, Joan Crawford, Claudette Colbert, Brigitte Heim, etc. Ces femmes au magnétisme puissant mettent en évidence ce lien passionnel de Karl Waldmann avec le cinéma.

Ainsi la présence des actrices, femmes d'exception médiatiques, ne fait que renforcer un autre thème récurrent, celui de la " femme " en général. La femme est présente partout (dans 300 oeuvres sur les 900 inventoriées), telle une ambitieuse nécessitÉqui participe à l'aventure unique de chaque photomontage. D'autres femmes plus discrètes, ou plus subtiles apparaissent dans d'autres oeuvres, ne fuyant toutefois pas leur récitation majeure.
La femme comme beauté, la femme comme outil de propagande, la femme " utilisée " tant par les nazis que par le régime communiste comme icône formatée soit de la tradition soit de la révolution. Une femme souvent entourée de " roue " comme si c'était elle qui faisait tourner le monde ou " devait " le faire tourner à la place des dictateurs. Il ne faut pas croire que Karl Waldmann mette sur le mê me pied le régime nazi et le régime soviétique, tout au contraire. Mais ce thème de la femme, qui structure à mon avis l'oeuvre dans sa totalité, se retrouve dans chacun des thèmes évoqués ici et donc aussi dans le contenu politique au sens large des oeuvres de Waldmann.

Si tout n'est pas " strictement " politique chez Karl Waldmann, il faut cependant lire Tout l'oeuvre avec une grille politique, culturelle vaste. Karl Waldmann est certe un artiste engagÉet en premier lieu du côtÉdes anti-nazis. Plusieurs oeuvres fustigent ainsi Hitler, les dignitaires nazis et se moquent avec beaucoup de cynisme de la sélection des races. Elles pointent l'apocalypse à venir et la chronique de la Shoah annoncée. Quelques oeuvres, réalisées après guerre, illustrent d'ailleurs la Shoah dans une construction glaciale. Tout ce qui a fait la gloire ou l'horreur du régime nazi, le culturisme, la musique, Wagner, Siegfried, l'architecture, la machine et le cinéma de guerre, la solution finale, Hannah Reich, la médecine de race, etc. éclate dans des constructions d'une précision architecturale. Comme chez Hannah Hoch, Karl Waldmann utilise les animaux, dans une perspective dadaïste, pour provoquer la critique. Les singes sont présents partout, pauvres primates qui ne pensent pas et que l'artiste met en relation avec les nazis.
Mais il s'agirait aussi de savoir si l'animal symbolise le pauvre primate dénuÉde parole ou s'il suggère bien au contraire, d'une façon éclatante, l'invitation par l'artiste à un retour à la conscience primitive...

Mais ce nazisme dénoncÉpar Karl Waldmann a une source plus profonde, celle de l'ordre et de la propreté, voir de l'hygiène, du corps ou de l'esprit, mal interprétée par le régime en question et cela nous conduit au thème de l'Hygiène cher à l'artiste.

Dès 1912, un musée de l'Hygiène voit le jour à Dresde. Il existe d'ailleurs toujours aujourd'hui. Dès le début du siècle, la médecine douce est en vogue, les bains de mer et de soufre, les sanatoriums qui procurent des soins, le culturisme, l'attention pour le corps. Plusieurs photomontages évoquent cette notion d'hygiène. En 1930, une grande exposition sur ce thème a lieu à Dresde dans le dit musée. Le pavillon russe est réalisÉpar Lissitsky. Le Musée actuel possède encore des documents sur cette exposition (malgrÉque la Ville de Dresde ait étÉrasée en 1945) et plusieurs photomontages de Karl Waldmann l'illustrent en utilisant les logos de l'époque. Cette notion d'hygiène, vous le comprenez, va ê tre déviée par le régime nazi pour aboutir à une hygiène de la race. " Enfant normal " dit Karl Waldmann dans un photomontage avec d'un côtÉun enfant blond et de l'autre la Hottentote Vénus (femme noire exhibée à Paris et à Londres) et entre eux deux : Adolf Hitler. Plusieurs oeuvres dénoncent cette " médecine " et cette sélection en utilisant d'ailleurs souvent des femmes noires. Il y a chez Waldmann un rapport entre le juif et le noir au point que certaines de celles-ci sont porteuses de cornes sur le front (okapi, défense d'éléphant), rappelant que la représentation de Moïse, suite à une mauvaise traduction de la bible de l'hébreu vers le latin, le montre avec des cornes lors de la prise en possession des tables de la loi et ce dès le XV siècle (cfr la sculpture de Michel-Ange). C'est mê me devenu une remarque antisémite de demander à un juif où il a mis ses cornes, en relation avec la représentation du diable dans l'iconographie chrétienne.

On retrouvera aussi ce thème de l'hygiène, liÉen partie au culturisme, dans sa critique du régime soviétique où parade et culte de la personnalitÉoblitèrent la vie des individus et le socialisme en général. Dans sa critique du socialisme, Karl Waldmann est sans doute à rapprocher de Rodchenko qui, tout en étant un artiste officiel du régime, n'accéda jamais au " statut suprê me " des artistes de l'URSS à cause de ses propos sur le régime ; il aimait le cirque et les cascades et écrivait en 1939 : " peut-ê tre que finalement le pays du socialisme n'a besoin ni de ventriloques, ni de prestidigitateurs, ni de jongleurs, ni de tapis magiques, ni de feux d'artifices, ni de planétariums, ni de fleurs, ni de kaléidoscopes ". Il se demandait si, dans son pays, il n'y avait de place que pour la politique et la propagande en faveur de thèmes venus " du haut " si bien qu'il ne restait plus d'espace pour la joie, les cascades, la lumière et le mouvement ' Cette vision des choses, cette audace, cette générositÉet cette insolence que nous retrouvons aussi chez Maïakovski, nous les trouvons chez Karl Waldmann. Ce dernier évoque d'ailleurs le poète - qui s'est suicidÉen 1930 - à travers plusieurs oeuvres. Si Karl Waldmann est sympathisant de la révolution, il est néanmoins ironique à son sujet et plus encore au sujet de la tournure qu'elle a prise. Un photomontage nous montre ainsi la fiche de police de Staline, arrê tÉen 1907 pour braquage de banque, avec un Al Capone ricanant audessus de sa tê te. Un tel photomontage peut nous faire immédiatement comprendre pourquoi ce " fou ", ce " Karl Waldmann " a fini dans un camp.

Il y avait peut-ê tre aussi chez Karl Waldmann, comme me l'a fait remarquer très justement un passionnÉde son oeuvre, un désir de féminiser le socialisme avec le thème de la femme, soucieuse d'une " hygiène humaniste ", qui traverse l'entièretÉde l'oeuvre. Un photomontage nous montre une femme soulignant de rouge à lèvre la bouche de Lénine mais en mê me temps, cette femme mécanisée à outrance, porte un gant d'acier (ou de gros tissu) qui l'isole hygiéniquement de la bouche de Lénine.

Les oeuvres de Karl Waldmann explorent encore bien d'autres thèmes : faits historiques, allusions à des romans ou à des poésies, femmes qu'il a connues en particulier ; " Cette Chère Hannah… " qu'il évoque au début d'un carnet contenant 20 photomontages ou Saharet, chanteuse de cabaret à Berlin en 1930. Il est difficile de tout citer ici tellement l'oeuvre est riche et encore vierge d'une étude en profondeur.


Certains parleront de " mystère " à propos de Karl Waldmann ou de certaines de ses oeuvres qui restent complètement énigmatiques par absence de texte ou de " signe " de l'auteur, moi je parlerais plutôt de " Roman " structurÉcomme un essai sur la folie du XX siècle.